Il y a quelques mois, j’ai fait l’expérience du Covid-19 en Suisse, lorsqu’il a été décidé de fermer les écoles et de travailler à domicile autant que possible. À l’époque, je pensais que ça serait assez difficile de passer quelques semaines à la maison avec les enfants, sans école, sans voir les copains. Je me demandais comment je pourrais occuper les enfants, sans les laisser des heures et des heures devant un écran. Et comment puis-je faire l’école à la maison, sans perdre le rythme et en combinant les exigences d’un enfant de 10 ans avec les besoins d’un enfant de 5 ans?
Nos journées avant Corona avaient un emploi du temps très exigeant. En plus de l’horaire scolaire, nous avions aussi des activités extrascolaires 4 après-midis par semaine, qui consistaient à jongler avec deux horaires différents des deux enfants, les amener et récupérer à plusieurs endroits, sans perte de temps. Le soir venu, j’étais fatiguée, profitant d’un moment de silence après que les dragons se soient endormis.
La panique s’est donc installée lorsque l’état d’urgence et la fermeture de l’école ont été déclarés. Je pensais que les jours passeraient lentement et ennuyeusement pour nous, jusqu’à arriver au point de n’en pouvoir plus. Après tout, c’est dans de telles situations que les relations sont validées. Mon mari, qui travaille d’innombrables heures chaque jour, devait être plus souvent à la maison. Merveilleux, mais comment ça allait se passer en pratique, me suis-je demandé. Apart les quelques jours de congé annuel, c’était rare pouvoir bénéficier de sa compagnie en journée, d’avoir des repas en famille ou qu’il puisse aider les enfants avec les devoirs. Finalement les jours de restriction à Berne sont passées relativement vite et de manière très agréable. Nous avons beaucoup profité de cette situation causée par la pandémie.
Heureusement qu’on s’aime et qu’on a toujours envie de passer du temps ensemble! Maintenant qu’en Suisse la situation de Covid est stabilisée et sous contrôle, que les écoles fonctionnent normalement et que les gens ont partiellement repris le travail, nous avons décidé de partir à l’étranger et de recommencer à zéro, mais sous une forme de quarantaine et d’état d’urgence beaucoup plus drastique dans la lointaine Australie.
La vérité est que tous ceux qui nous connaissent comme famille depuis 5 ans connaissaient notre rêve de partir pour l’Australie pendant au moins un an. Et l’année 2020 c’était l’année de la chance, celle où l’Australie ouvrirait ses portes à notre famille. Malgré la bureaucratie extrêmement laborieuse et coûteuse, il semblait que nous allions partir comme prévu par le contrat de travail, à partir du mois de juillet. Ça n’aurait pas pu être mieux, car cela signifiait profiter de quelques jours de vacances et rendre visite à nos familles en Roumanie et en Espagne, avant de se lancer dans l’aventure australienne.
Mettons de côté les détails d’attendre le visa et l’autorisation spéciale qui nous a permettrait d’entreprendre le voyage et d’entrer en Australie. Une fois tous ces critères remplis, nous avons pu faire nos valises. Pendant quelques semaines d’affilée, la compagnie aérienne nous a contactés deux jours avant le vol, pour nous annoncer avec regret que le vol était annulé….Nous étions sans travail depuis la fin du mois de juin et maintenant nous étions déjà en août et les enfants allaient commencer une nouvelle année scolaire dans seulement 3 jours. Ça n’était pas du tout dans nos plans.
Nous avons réussi à trouver des billets avec une nouvelle compagnie aérienne, et finalement prendre l’avion. Le premier jour de la nouvelle année scolaire, tous les copains étaient à l’école, et nos enfants embarquaient dans un Airbus A350 avec seulement trois autres passagers en plus de notre famille. Une expérience unique, en effet, d’être dans un avion pratiquement uniquement pour nous. J’avoue que le sentiment d’être VIP était présent. L’équipage à bord était plus nombreux que les passagers, et je ne sais pas si je revivrai cette expérience un jour. Je pense avec horreur au retentissement économique que le Corona a généré dans le monde entier.
Une fois débarqués en Australie, nous avons été escortés par la police jusqu’à un hôtel pour les 14 jours de quarantaine requis. Au fait, je suis toujours dans la même chambre d’hôtel alors que j’écris ceci, le douzième jours d’isolement. Il m’est absolument interdit de quitter la chambre. Tant de jours depuis la dernière fois que j’ai senti une brise ou un vent dehors. Maintenant, c’est le moment de se souvenir des belles promenades dans les Alpes suisses, à quelques minutes de route de chez moi. Nous avons la liberté de passer d’une chambre à l’autre parmi les trois qui nous ont été attribuées. Nous avons la chance de voyager avec des enfants, car les adultes non accompagnés d’enfants ont une chambre plus simple. Les conditions sont merveilleuses, et je pense que cela se reflétera dans la facture finale. Mais pour l’instant, tout ce que nous voulons, c’est pouvoir sortir nous promener. Seulement cela. Etre dehors. Sentir le vent australien souffler. Quelle est l’odeur de l’air australien ? Bien sûr, les fenêtres ne peuvent pas être ouvertes. Cela serait beaucoup trop dangereux dans la situation actuelle, surtout pour ceux qui se mettent en quarantaine isolés.
Le week-end, il y a un spectacle en direct : en de rares occasions, des Australiens viennent rendre visite à un membre de leur famille mis en quarantaine dans une des chambres d’hôtel. Ils s’assoient à l’extérieur dans la cour et regardent la multitude de fenêtres. La personne emprisonnée se trouve près de la fenêtre en verre fumé, le téléphone appuyé à l’oreille. Pendant quelques minutes, tous les autres résidents profitent du spectacle et imaginent leur conversation. Sinon, il ne se passe pas grand-chose à l’extérieur.
À la fin je constate avec joie qu’après toute cette expérience nous nous aimons toujours et que nous ne sommes pas devenus complètement fous.